Time-Lab Paris Institut d'études et de recherches postmodernes
Time-Lab Paris  Institut d'études et de recherches postmodernes

1) Le projet d’un laboratoire du temps

 

2) Les causes postmodernes d’une crise systémique

 

3) Le métaprincipe de la désambiguïsation

 

4) Les activités dans l’enseignement et dans la recherche

 

5) Les perspectives pour une super-civilisation

 

 

    1) Le projet d’un laboratoire du temps

Au 20ème siècle la notion du temps a fait carrière aussi bien dans les sciences humaines que naturelles. Cette attention prêtée au sujet de temps a été marquée par quelques mots clés comme celui de l’accélération du changement social ou la croissance du stress dans l’expérience individuelle (qu’elle soit d’ordre professionnel ou personnel) ou encore la fameuse relativité de l’espace-temps selon Einstein.

Au 21ème siècle le monde se lance dans une mobilisation totale sur le plan technologique mais aussi culturel et nous impose des nouvelles expériences et des défis en permanence. Grâce au progrès technique dans la communication (portable, Internet) nous pouvons nous trouver désormais à plusieurs endroits différents et en même temps, ce qui pose un nouveau problème de l’identité d’une personne. Qui suis-je, si je peux être toujours un autre quelque part ailleurs ? Cette question se pose également sur le plan culturel pour un phénomène migratoire qui devient, dans un contexte humanitaire et économique difficile et sévère, de plus en plus important : faut-il se déraciner pour s’enraciner dans ce monde nouveau ? Peut-être, mais comment ? Il se peut que le monde connu a disparu une fois pour toute ; est-ce la fin de l’ordre établie de notre façon de vivre ? Ou est-ce plutôt la fin des concepts préfabriqués avec lesquels nous nous imaginons, nous expliquons le monde d’aujourd’hui ? Pour aborder les questions de la vie actuelle et les traiter de manière appropriée, il faut éviter le risque que nos manières de penser soient déjà périmées avant d’en faire usage pour expliquer cette vie. C’est le cas quand elles accrochent toujours au monde ancien et ne correspondent plus au monde nouveau. Ne vaudrait-il mieux pas enraciner de nouveaux concepts dans un monde nouveau, voir de les développer à partir de ce monde actuel ?

La création de l’institut d’études et de recherches postmodernes réagit aux exigences actuelles d’une mobilité intellectuelle en se confrontons à des phénomènes contemporains et en testant de nouvelles hypothèses pour mieux expliquer et mieux comprendre dans quel monde nous vivons.

 

 

2) Les causes postmodernes d’une crise systémique

Depuis la crise financière de 2008 il est clair que la société moderne n’arrive plus à se perpétuer de manière habituelle ; c'est-à-dire à travers une gouvernance (« leadership ») économique. Du coup « le monde ancien » s’empêtre dans une épidémie de crise. Nous avons assisté non seulement à un crash de Lehmann-Brothers, mais plus encore à une avalanche de crises, qui commençait dans les banques pour se transformer en crise financière, suivie par une crise économique, qui déclenchait une crise politique et se terminait finalement comme crise sociale chez les citoyens –pour l’instant. Constatons-le : tous nos problèmes sont reliés les uns aux autres. Pourquoi les solutions ne les seraient-elles pas non plus ?

C’est pour cette raison que c’est une erreur de croire en une crise d’adaptation de la société moderne, qui optimiserait la distribution des ressources d’une meilleure façon. Il n’y a pas d’optimisation sans optimiser la crise avec. Car il ne s’agit pas d’une simple crise d’adaptation, mais d’une crise systémique globale. La société se réinvente ; ses institutions (car elle préfère maintenant les mouvements aux organisations p.e.) comme ses valeurs (et opte pour l’individualisme partagé). Pour arriver au « monde nouveau », métaphoriquement parlant, il faut oser prendre le vol pendant la nuit sans voir ni horizon ni terre. Nous voilà dans un charter au milieu de nulle part, sans instruments fonctionnels à bord, alors sans diagnostic valide.

Que cette situation soit passagère ou non, elle signale un dysfonctionnement fondamental de la société moderne : l’économie (surtout monétaire) se détruit elle-même en ne faisant rien d’autre que ses excès normaux, la politique s’abolit, elle, en venant à l’aide à l’économie et rend sa propre responsabilité aux banques centrales. Dans l’éducation et l’enseignement règne la stupeur ; la chasse aux orientations pédagogiques nouvelles est ouverte et se présente comme réformisme. La société moderne n’a ni connu ni prévu un état ou des systèmes sociaux comme l’économie, la politique ou l’éducation ne fonctionnent plus. C’st une première. La fonctionnalité a été l’idéologie moderniste par excellence.

Voilà le problème actuel : nous sommes confrontés à une situation post-moderne. Au 20ème siècle la postmodernité n’était qu’un concept philosophique, aujourd’hui c’est une réalité sociale, qui ne se veut pas en concurrence avec la modernité, mais comme dispositif de nouveaux problèmes.

 

 

3) Le métaprincipe de la désambiguïsation

 Comment penser et agir de manière actuelle, sans rompre avec le passé et son pouvoir d’interprétation (p.e. à travers des catégories) sur l’étant donné? Rappeler le présent à sa condition du présent, c’est une obligation pour comprendre le réel ; notre présent tombe dans le passé quand nous cessons de lui attribuer un intérêt actuel et de l’apercevoir selon des idées et des concepts nés hier. Appliquer des standards et des routines (intellectuelles) ne peut fonctionner tant que le monde ne bouge pas, ce qui n’est évidemment pas le cas d’une société en crise. Que peut-on gagner si on l’ignore en mettant en application des standards et routines quand même ? Pour le mieux nous saurions à quel degré le monde d’aujourd’hui correspond à nos attentes cognitifs ; mais cela ne veut rien dire de ce monde actuel. C’est tout simplement une auto-vérification de nos attentes. Mais pourquoi donner la priorité à nos attentes quand on se lance dans une recherche des faits nouveaux forcément très peu expérimentés, alors probablement inégaux à notre vécu qui a formé nos attentes ? Pour mieux s’orienter ? Autrement dit : pour mieux domestiquer sa peur du nouveau ? Nous saurions, dans un cas où nos attentes n’étaient pas satisfaites, rien de plus d’un « monde nouveau » sauf qu’il n’est pas comme l’ancien. Quel est le monde actuel en tant que tel? Cette question resterait sans réponse.

Pour connaître un « monde nouveau » en tant que tel, il faudrait faire appel à un autre principe de reconnaissance, celui de la désambiguïsation. C’est à dire : il faut en finir avec l’ambiguïté temporelle entre phénomène et sa qualification, qui datent chacun de contextes différents. Pourquoi des schémas cognitifs n’évolueraient-ils pas ensemble pour comprendre le monde d’aujourd’hui d’après sa propre cohérence, qu’elle soit classique ou non ? Au laboratoire de temps nous tâchons de développer l’art de la désambiguïsation comme mode d’analyse contemporaine.

 

 

4) Les activités dans l’enseignement et dans la recherche

‘Time-Lab Paris’ est un institut d’études et de recherches. En tant que tel il se veut transdisciplinaire et international, dans son programme comme dans son équipe.

L’institut propose, quant à son enseignement, un grand éventail de séminaires ou encore des conférences et colloques. Sous la direction de l’institut nous invitons des intervenants spécialisés dans un domaine en France comme depuis l’étranger. Pour un scientifique il existe la possibilité de rejoindre l’institut dans le cadre d’un ‘fellowship’ pour une durée d’une année. L’enseignement est en principe gratuit et ouvert au public. Cependant nous proposons aussi des séminaires à huis clos pour des cercles de réflexion, qu’ils viennent du monde des entreprises ou scientifique.

Dans le contexte de la recherche, l’institut s’offre la possibilité d’un blog portant sur un sujet d’actualité. Ce blog est mené  par une double perspective européenne et hors d’Europe, présenté comme débat au sein de l’institut. Les publications de l’institut visent à susciter et accompagner la mise en place de travaux sur l’actualité dans différents champs des méthodes ou des perspectives sociétales, dites post-modernes.

 

 

5) Les perspectives pour une super-civilisation

La civilisation moderne a été, depuis son début au 19ème siècle, convaincue qu’elle se propagerait dans le monde entier, sans limites ni de temps ni de pays. Cet optimisme progressiste a fait faillite depuis, les utopies sont épuisées et même la religion, autrefois bannée comme figure de l’irrationalisme, est en train de revenir sur scène. La fameuse modernité arrive par contre de mieux en mieux  à s’abolir elle-même. Cette retraite met en place une transition pour un « monde nouveau ».

La ‘post-démocratie’ ou la ‘postmodernité’, le ‘capitalisme tardif’ ou le ‘post-social’ voilà quelques mots clés qui accompagnent cette transition depuis quelques années à juste titre. Leur force prospective se nourrit cependant du contexte moderne (souvent jusqu’à la lexique), qu’ils visent à surmonter. Ces concepts se présentent comme alternatives, bien que c’est l’alternativité en elle-même qui pose aujourd’hui problème : les journaux ne se mettent plus seulement en concurrence entre eux-mêmes pour gagner de l’argent, mais ils rentrent en concurrence directe avec la télévision et l’Internet ; l’art se métamorphose en excellent placement d’argent, n’empêche que l’économie apparaît très émotive. Actuellement nous sommes témoins d’une hybridation générale ; il y a une compétition de tout avec tout, sans présélection, comme si le dispositif moderne n’arrivait plus à s’auto-régler à travers ses schémas et catégories établis.

Une hybridation, voir compétition générale ? Mais à quoi bon ? Pour répondre à cette question il faut se projeter par-dessus du cadre moderniste et élaborer quelques perspectives pour un nouveau projet de la civilisation. Il faut penser une super-civilisation. Que signifie ce terme peu conventionnel en dehors du fait qu’il soit un schéma heuristique pour interpréter des nouveaux faits de manière nouvelle ? Il saisit une certaine évolution vers une forme de méta-culture mondiale : nous vivons de plus en plus de manière urbaine et technologique (après les PC, ce sont maintenant les robots qui font leurs rentrée dans les ménages, l’Internet 2.0 fait partie de notre esprit, voir notre conscience, sans parler des implants high-tech dans nos corps), tandis que les relations humaines se professionnalisent. Un comportement se formant selon ces règles a pour effet de se tenir à distance de ses propres émotions. Parce que c’est la tâche principale de chaque culture, de contribuer à un contrôle affectif, nous voilà –en pleine tempête d’une crise moderne- à l’aube d’une super-civilisation, qui crée et utilise de nouveaux médias pour une nouvelle forme de société. Les médias sociaux se sont déjà bien positionnés pour cela. Mais aussi bien le tourisme que la religion et même une nouvelle économie de l’expérience prétendent à suivre. Il faut donc chercher des formes et expressions de ce processus de civilisation, pour faire dépasser la crise systémique de la société moderne et agir autrement.